Casual Gabberz Meilleurs Voeux Forever Couvre x Chefs

Casual Gabberz, hardcore jusqu’à la mort

Bon, il aurait été difficile de ne pas commenter la dernière compilation Meilleurs Vœux (Forever) de Casual Gabberz qui tire sa révérence après 10 ans d’existence à faire deux, trois trucs importants dans la fête et ailleurs. On assume ici une vision très personnelle de Casuel Gabberz, c’est ce qui nous a intéressé dedans et ce pourquoi on a écouté, vu, joué tous ces morceaux ces dix dernières années.

Les actualités sont ce qu’elles sont, et il est délicat d’en faire abstraction, ce qui est certain c’est qu’en ouvrant l’espace à un mash-up permanent entre gabber, hardcore et rap de tous les horizons Casual Gabberz a créé une brèche dans un monde la nuit parfois bien poli et bien bourgeois sous ses airs de transgression permanente et d’inclusivité néolibérale. À titre personnel je me souviens d’être tombé sur Casual Gabberz comme tout le monde avec Evil Grimace et « 3 Litres » (de Vodka) que j’avais trouvé râpeux et pas très politiquement correct, mais que je me suis empressé de repasser ensuite bien des fois. J’habitais à l’époque dans une des villes les plus à droite de France, avec un maire ex champion de moto où dans le tram on entendait des remarques racistes avant 7h du matin, ça faisait sens d’être énervé. Après j’ai joué et rejoué tellement de fois le remix de L.O.A.S (ndlr « VLV (RER E Remix) ») que j’ai vite arrêté de compter, on était en plein mouvement social, avec une brutalité policière jamais vue depuis le préfet et collabo Papon et un gouvernement se lavant les mains de la répression, c’était le son parfait pour le moment.

Faut bien situer aussi qu’il y a 9 ou 10 ans, on est encore à fond dans les sets de la Concrete et les 130 BPM allemands, alors quand en France, en plus de la « néo-vogue music », des compilations de NAAFI, et des prémices de la « deconstructed club music », on se prend en pleine tête le « frapcore », ben ça fait un bien fou. Y a des soirées qui émergent, des orgas qui prennent en charge des soirées qui se soucient de tout le monde et qui brassent les scènes électroniques. Plus besoin de se sentir en uniforme d’étudiant en école de commerce, ça a été une sacré libération. Plus besoin de se sentir bourgeois et bohème, ça aussi quelle sacrée libération ! Plus besoin de se sentir parisien intra-muros, encore une plus grande libération !

Donc voilà Casual Gabberz ils sont arrivés là comme ça d’un coup, en mélangeant du rap français et du gabber, ils ont créé un truc qui s’appelle le frapcore et ça a libéré pas mal de gens pour se sentir ok de sortir en club. Et ils ont aussi ramené des gens des free party, ils ont créé un vrai truc. Ils ont jamais esquivé les mouvements sociaux et politiques, loi travail, gilets jaunes, retraite, violences policières, montée de l’extrême droite et des fascismes, et tout ça dans un milieu où les enfants de la bourgeoisie étaient jusque-là hégémoniques et le sont probablement toujours.

Voilà pas grand-chose à dire de plus, si ça n’est qu’en plus cette compilation est ultra cool, dont un bootleg remix zinzin avec du Diam’s dedans. Et puis dire aussi que sans Casual Gabberz des collectifs comme Southfrap Alliance ou Shtelameï n’auraient sans doute pas vus le jour de la même manière, c’est dire si ça a un produit quelque chose quand même.

Casual Gabberz c’est toute une génération de producteurs qu’on va retrouver dans nos clubs et festivals, c’est aussi une compilation d’anthologie toujours disponible qui brasse beaucoup de ce qui fait la scène électronique aujourd’hui, Inutile de Fuir, et une musique qui va vivre on l’espère encore longtemps aussi décloisonnée que possible et aussi politique que nécessaire dans un climat plus que terrible, alors bella ciao, soyons conséquent·e·s et « hardcore jusqu’à la mort ».